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Maroc : que valent les partis ?

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Maroc : que valent les partis ? Empty Maroc : que valent les partis ?

Message par Admin Dim 21 Aoû - 14:53

Depuis l’adoption de la nouvelle Constitution, la classe politique marocaine a les yeux rivés sur les élections législatives anticipées, prévues le 25 novembre. Tour d’horizon des principales forces en présence.

Maroc : que valent les partis ? 01208210
Le Parlement devra se réunir en session extraordinaire.

Dans son discours du Trône du 30 juillet, le roi du Maroc Mohammed VI n’avait pas tranché sur la question de la date du prochain scrutin législatif. Tout juste avait-il appelé « tous les acteurs concernés à adopter un échéancier rigoureux », indiquant qu’il « importe de commencer par l’élection de la nouvelle Chambre des représentants ». Le ministre de l’Intérieur, Taïeb Cherkaoui, a mené des concertations et finalement annoncé la date du 25 novembre.

Précipitation ou retour à la normale, c’est la déprime postréférendaire, après le « printemps » de la rue. « Une nouvelle Constitution en gardant les mêmes élites, ça fait désordre, note un diplomate. Après le plébiscite en faveur du oui lors du référendum constitutionnel, tout le monde attend un nouveau gouvernement. » Solder la réforme, donner un nouveau souffle… La promesse de rupture est alléchante, mais les habitudes perdurent.

Les textes nécessaires à la préparation d’un scrutin équitable et réussi ne sont pas débattus au Parlement, ni sur la place publique, mais en conclaves fermés. L’État impose son rythme : loi sur les partis politiques, loi sur les observateurs des élections, code électoral, loi organique de la première Chambre… Un joli embouteillage législatif en vue pour le Parlement, qui devra se réunir en session extraordinaire afin de valider tous ces projets de loi portés par l’omniprésent ministère de l’Intérieur. Au sein des partis, la bataille fait rage pour les premières investitures. Panorama.

Istiqlal : un bilan dans la balance
La scène résume la situation dans le parti du Premier ministre : mardi 19 juillet, devant le siège de l’Istiqlal, à Rabat, des bus déposent des gros bras rameutés par Hamid Chabat, député-maire de Fès et secrétaire général de l’Union générale des travailleurs du Maroc (UGTM, syndicat istiqlalien). Le nouvel homme fort du parti conservateur entend déloger les dizaines de diplômés-chômeurs qui occupent les lieux. Le coup de force ne dure pas, et les squatteurs ne repartiront que le lendemain, après négociations. Mais le symbole est là : l’Istiqlal n’accepte plus de se faire marcher sur les pieds.
Abbas El Fassi, après quatre années à la tête du gouvernement, fait l’expérience de l’usure du pouvoir. Il est prêt à passer le témoin, après les législatives. En attendant, les caciques remettent en marche l’appareil pour les élections, alors que les quadras comme Karim Ghellab (ministre des Transports) ou Adil Douiri (ancien ministre du Tourisme) prennent quelques mèches grises et rongent leur frein.

RNI : objectif primature
Le Rassemblement national des indépendants (RNI) est de toutes les coalitions gouvernementales depuis trente ans. Mais depuis que son fondateur, Ahmed Osman, a quitté le poste de Premier ministre en 1979, personne du parti de centre droit n’a repris cette fonction. Porté à la tête du RNI en 2010, Salaheddine Mezouar renoue avec cette ambition : l’actuel ministre de l’Économie se prépare à un destin de chef de gouvernement. La législature qui s’achève a permis de tester une future alliance avec l’Union constitutionnelle (parti de l’administration, moribond) et de préparer celle avec le puissant Parti Authenticité et Modernité (PAM).
Le RNI a lancé il y a deux ans un ballon d’essai en évoquant un pôle libéral. Reste à savoir qui va animer ce pôle. Depuis quelques mois, les problèmes internes priment, avec la démission de Jaafar Heikel, directeur général du parti, et l’exclusion d’Abdelhadi Alami, magnat du tourisme et de la presse. Très sollicitées lors du « putsch » qui avait intronisé Mezouar, les agences de communication du RNI comptent s’appuyer sur le charisme de ses jeunes ministres : le télégénique Yassir Znagui (Tourisme) et l’ambitieux Moncef Belkhayat (Jeunesse et Sports).

PJD : la marche du crabe
Jeudi 21 juillet, la jeunesse du Parti de la justice et du développement (PJD) accueille en grande pompe le leader d’Ennahdha, le parti islamiste tunisien : Rached Ghannouchi a enflammé la salle omnisports de Kenitra… mais il a aussi dîné à la table du Premier ministre, Abbas El Fassi. Le PJD a gagné en respectabilité, même quand son secrétaire général, Abdelilah Benkirane, souffle le chaud et le froid. Au lendemain du référendum, il avait mis en doute le taux de participation officiel (73 %) dans les colonnes du quotidien britannique Financial Times, avant de se rétracter dans un communiqué officiel.
Lui qui tonnait hier contre l’inscription de la liberté de conscience dans la nouvelle Constitution invite aujourd’hui Nabil Benabdellah, du Parti du progrès et du socialisme (PPS), à rejoindre son gouvernement « [s’il] gagne ». « Face à l’apathie des forces de gauche et des autres partis, le PJD est sorti gagnant de la réforme », note un membre de la Commission consultative de révision de la Constitution. Évitant les obstacles, drapé dans sa référence à l’islam, le « parti de la lampe » marche comme son chef. En crabe.

USFP : cure d’opposition ?
Le parti historique de la gauche marocaine a bien négocié le virage du 20 février. Ses jeunes militants ont d’abord abondé dans les rangs du mouvement, et le parti en a soutenu l’esprit contestataire sans se laisser entraîner dans ses querelles. Pendant le processus de réforme de la Constitution, sa direction s’est rassemblée autour d’un texte pragmatique dont « 97 % des revendications » ont été retenues, selon son secrétaire général, Abdelouahed Radi.
L’Union socialiste des forces populaires (USFP) a logiquement fait campagne pour le oui au référendum, en réservant ses combats pour les législatives. En 2007, le parti avait reculé à la cinquième place, avec 38 députés (sur 325). Revenu au centre du jeu politique, il voudra peser sur la formation du futur gouvernement. Seule une partie de la base souhaite un retour à une stratégie de confrontation, qui passerait par un retour dans l’opposition. Parti d’intellectuels et de fortes têtes, l’USFP a décidé de reléguer ses luttes intestines au congrès, qui se tiendra en fin d’année.

PAM : patchwork insolite
Visé par les manifestants comme le symbole de l’affairisme et des conflits d’intérêt, Fouad Ali El Himma a fait le dos rond pendant plusieurs mois. L’ex-ministre délégué à l’Intérieur et ami du roi, en compagnie duquel il a encore été aperçu récemment, a pris ses distances avec le parti qu’il a créé en 2008. Sans lui, le curieux attelage d’anciens gauchistes, de notables de région, d’affairistes recyclés et d’ambitieux de la politique commence à ressembler à un patchwork de plus en plus insolite.
Le Parti Authenticité et Modernité vit aujourd’hui au rythme des défections. Début juillet, l’avocate Fatima Zahra Mansouri a mis sur la table sa démission de son mandat de maire de Marrakech et de membre du parti – lequel a rejeté sa demande. Le 20 juillet, c’était au tour de Khadija Rouissi, militante des droits de l’homme et fondatrice du parti, de claquer la porte, dénonçant l’absence d’un réel projet moderniste. Malade, le PAM ? Pas sûr… Arrivé en tête lors des communales de 2009, il s’est transformé en redoutable machine électorale, attirant de nombreux adhérents en un temps record.

PSU, PADS, CNI : nouvelle gauche
Relancés par le Mouvement du 20 février, les partis de l’Alliance de la gauche démocratique – Parti socialiste unifié (PSU), Parti de l’avant-garde démocratique et socialiste (PADS) et Congrès national Ittihadi (CNI) – hésitent à convertir leur capital sympathie en résultats électoraux. Parmi eux, le PSU fait figure de leader. Issu de la fusion de l’Organisation de l’action démocratique populaire (extrême gauche) et de transfuges de l’ancienne jeunesse de l’USFP, c’est un parti de militants implantés dans de nombreuses villes moyennes. Mais, coincé entre un penchant pour le plaidoyer (mouvements sociaux, droits de l’homme) et des ambitions réformistes, il doit trancher. Après l’appel au boycott du référendum, balayé par la forte participation, les législatives testeront les intentions de la « nouvelle gauche ».

Du côté de la jeunesse...
Fer de lance du « printemps arabe », la jeunesse peine à se positionner dans la compétition électorale. Et ce d’autant plus que, ces derniers mois, les cartes ont été rebattues. De nouvelles figures ont émergé dans les médias avec lesquelles il faudra désormais compter. En outre, le conflit générationnel se double d’une crise de la représentation. Organisations de la jeunesse marginalisées, mainmise des fondateurs et de leurs héritiers sur les directions… La démocratie interne redevient la lutte prioritaire des jeunes militants.
De son côté, le Mouvement du 20 février maintient sa méfiance vis-à-vis des élites, même si certains de ses leaders sont courtisés par les partis. On murmure ainsi qu’Oussama El Khlifi, surnommé « le Che de Salé », sera candidat de l’USFP aux prochaines législatives. Une rumeur relancée par le projet de liste nationale pour les jeunes. Sur le modèle de la liste nationale des femmes lancée en 2002, l’État souhaite appliquer la discrimination positive pour les moins de 35 ans.

17/08/2011 à 08h:38 Par Youssef Aït Akdim, à Rabat
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